167- Entre deux pastilles (07JUIL25 1/1)!

Encore une fois, j’ai décidé de vous embarquer avec moi dans un imaginaire toujours prêt à vagabonder. La mienne. Une imagination introspective, dirais-je, qui aime flâner là où les grandes intrigues ne daignent pas d'aller. Ici encore, pas de trauma, rien d’assez dramatique pour en faire une série à la District 31 (série de Radio-Canada où deux collègues courent après les meurtres à coups de punchs western spaghetti), ni même à la Chambre en ville (feuilleton de TVA où les résidants d’une pension d’étudiants vivent les hauts et les bas de l’amour... version cigarette derrière l'oreille et coupe Longueuil). Non. Ce que je vous raconte, c’est encore plus... futile que ça. Même Watatatow aurait hésité à mettre ça en ondes (téléroman pour les 14-18, qui ont pourtant fait des épisodes sur les muffins, les piercings et le karaté dans le gymnase).

Mais bon. Comme j’adooooore déblatérer sur des trucs ordinaires pour en faire de l’extraordinaire... je me relance tête première dans une nouvelle aventure du « Pays d’en bas ». Pas celui de Séraphin Poudrier, rassurez-vous — je parle de celui de mes pensées, là où ça se passe vraiment. Cet endroit où je prends tout mon plaisir... à vous raconter tout ça. Cette fibre de Fabienne Larouche (prolifique scénariste et productrice de série québécoise qui ont marqué l'imaginaire, incluant Lance et Compte) en moi est toujours prête à vous pondre une quotidienne de mes non-aventures, hihihi!

Avant d’aller plus loin — avant de pénétrer dans un haut lieu du bonheur vendue en bouteille — petit détour par mes réseaux sociaux. Question de voir ce que j’ai manqué dans l’histoire de l’humanité depuis ce matin. Ouin... disons que même en scrollant deux cents stories aux cinq minutes, je doute de tomber sur quelque chose qui me fasse vibrer d’émotion. À part quelques vidéos de chats, deux ou trois femmes rondes qui présentent leur haul Shein, ou encore… cette publicité. Oui, cette pub… qui… est… venue… me… caaaaaptiver!

Même après dix écoutes, vingt captures d’écran, cinquante questions à l’IA et cent bouffées de chaleur, impossible de trouver le nom de cette actrice du feeling, toute en courbes et en douceur. Elle n’a peut-être pas encore eu droit à un hommage en bonne et due forme, mais une chose est sûre : TD Assurance a réussi à rejoindre un fidèle auditeur. Un spectateur intensément ému. Je suis celui qui a probablement fait grimper le BBM (le Bureau of Broadcasting Measurement, maintenant rebaptisé Numeris) juste pour cette pub!

Bref, pas besoin de vous faire un dessin : la femme ronde de la pub mériterait un Oscar pour l’ensemble de son… œuvre. Huuuuum... oooooh oui!

Viiiiite! Assez perdu de temps! Je range mon téléphone à l’endroit d’où il n’aurait jamais dû sortir. Il est 16h30, samedi après-midi, et je dois absolument faire un saut à la SAQ (Société des Alcools du Québec). J’ai un souper de prévu ce soir, planifié il y a au moins un mois — ce n’est pas le moment de tout foutre en l’air à force de scroller sur Instagram comme un ado hyperactif.

Encore un peu et je me retrouvais au dépanneur à acheter une bouteille de piquette style « Notre Vin Maison ». Flashback instantané : cégépien que j’étais, on achetait parfois des litres de vin blanc de dép pour virer une bonne vieille brosse cheap et roter le raisin vert pendant une semaine. Dans ce temps-là, les poppers alcoolisés n’existaient pas encore. Le seul breuvage fluo un peu funky, c’était le Casal Domingo… à 0,5 % d’alcool. Du jus de raisins tristes.

Goooooo! Je fonce vers la SAQ comme un cheval lancé au galop, pendant que la SAAQ (Société des Assurances Automobiles du Québec) se fait enivrer en commission d’enquête pour ses dépassements de coûts faramineux. Même si aucune affiche syndicale ne tapisse les vitrines de ma SAQ locale, j’ai cette angoisse irrationnelle qu’une clause secrète de la dernière convention collective empêche désormais l’entrée de tout client qui se pointe à la porte après 16h31 un samedi.

Ben non, la porte s’ouvre automatiquement, comme il se doit. Le commis barbu et ventripotent m’accueille avec son éternel sourire en coin, m’invitant à goûter des produits « sélectionnés », comme d’habitude. Autour de moi, des clients aguerris s’emparent frénétiquement de leur panier, prêts à le remplir avec la même ferveur que s’ils se battaient pour du papier de toilette au Costco en pleine pandémie.

Et moi, humble amateur de vin — tellement amateur que le programme de fidélité menace de résilier mon abonnement faute de visites régulières — je me cherche. Littéralement. Dans ma tête, je refais mes leçons de géographie, j'enchaîne avec un survol d’économie familiale et je termine avec un petit tour tour en arts plastiques : choisir une région viticole, deviner la couleur du cépage et du terroir, évaluer le rapport qualité/prix/point-prime, et trouver la pastille qui me parle.

Ma mémoire, toujours aussi volage, me rappelle que la dernière fois, j’avais opté pour un pinot noir français, pastille fruité et léger, qui m’avait doublé mes points prime. Allez, rebelote! On ne réinvente pas la roue un samedi à 16h30. En parcourant les étals, je me rends surtout compte d’une chose : il va falloir que je me rende à l’évidence. À cinquante ans bien sonnés, il est peut-être temps d’accepter mon sort… et de me faire faire des lunettes à double foyer!

Même si la pastille « bourgogne, aromatique et chaaaarnue » me fait de l’œil, je me contente sagement de ma pastille de base. Jusqu’à ce que… j’aperçoive une bouteille rousse, au renflement suggestif à mi-hauteur, arborant une pastille verte : « sucrée et dodue ». Je replace mes lunettes. Ai-je bien vu? Oooooooooh... oui. C’est mieux avec mes verres.

Tout juste à l’étal perpendiculaire — celui des gins, pas juste du De Kuyper ou du London Dry — vous me croirez pas, mais il y a une feeeeemme, style plump, d'un âge indéfini. Juste assez de courbes pour dire : femme forte, assumée, sacrément magnétique. Vue de dos, je reste sage. Un regard furtif, sans tenter un remake 4K d'un de mes souvenirs adolescents.

Parce que, voyez-vous, il y a longtemps, très longtemps, j’étais commis dans un Boni-Soir. C'était dans le temps où les dépanneurs avaient une vraie vocation : vendre des cigarettes, des popsicles, et des cannes de soupe, même les jours fériés. Les épiceries fermaient à 18 h, les magasins étaient clos le dimanche pour ne pas rater le sermon du curé, et 25 ¢ t’achetait cinq gommes Bazooka plus caoutchouteuses que ma réalité hormonale de l’époque.

C’est là, entre le congélateur à lait et le frigo à bières, que ma vie de jeune homme a pris une tournure… charnelle. Une collègue caissière, majeure (et bien avancée dans sa majorité), débarque un dimanche d’été, en congé pour elle, en corvée de nettoyage du frigo à carton de lait pour moi. Elle était habillée pour.. un calendrier de garage, crop top blanc qui se soulevait sous les seins, short orange façon Hooters. Son sourire me traverse comme une décharge électrique. Quelques rigolades sont échangées, elle se retourne. Se penche pour attraper un sac de chips. Et là — Dieu bénisse la loi de Murphy — son short se tend, se crispe, grimpe, dévoile ce que je n’avais encore jamais vu : les premières fesses de ma vie à me connecter, live, sans avertissement parental, à ma sexualité.

Ouf… c’était fou. Retour en 2025. La femme à la SAQ ne me gratifie pas d’un sourire à me fendre les feelings, non. Je la regarde, intéressé sans avoir l’air intéressé. Ses cheveux roux, ondulés, reposent paresseusement sur ses épaules. Son t-shirt blanc épouse des formes qui n’ont pas besoin de faire leur propre publicité, pendant qu’un short Lululemon vert lime s’accroche à son bassin comme une promesse.

Première chose qui me vient à l’esprit : « Je ne savais pas que Lululemon faisait des shorts yoga pants. » Deuxième pensée, quand la rousse s’accroupit pour zieuter l’étagère du bas : « Regarde en avant. T’es venu pour un pinot. Un pinot. »

Ooooomyyyyplump!

La cliente, accroupit, les genoux écartés, tendue comme une corde de violon — tout son corps se dévoile sous mes yeux de pèlerin. Les vêtements, eux, sont devenus une extension de sa peau. Les plis de dos se dessinent, les hanches prennent de l’ampleur, les cuisses se gonflent comme du pain en train de lever, le short vert devient presque transparent dans mon imaginaire trop éveillé. Wooooow!

Si elle savait le combat intérieur que je livrais… Merci Murphy, pour ta foutue loi. Je n’ai aucune idée de comment j’aurais pu justifier ce moment si elle s’était retournée et m’avait demandé : « Est-ce que je vous aide ? » J’aurais sûrement bafouillé : « Non, non... je cherche un rouge… équilibré… comme vos proportions. »

Lululemon, on va se le dire, a manifestement engagé des maîtres de l'architecture des corps. La fameuse couture suggestive qui laisse croire qu’on voit la petite culotte, le tissu qui sépare les fesses en deux factions opposées, la posture qui fait apparaître un discret monticule là où les poètes voient la vie naître… c’est complètement m-a-l-a-d-e.

Ben oui, j’étais figé là, incapable de décrocher. Jusqu’à ce qu’un couple vienne discuter à côté de moi, brisant ma transe contemplative. J’ai pris une bouteille trop chère, pas celle que je voulais, comme si j’offrais un pourboire mental à la femme qui venait de raviver mes souvenirs… en version haute définition.

Si vous saviez le pouvoir que cette inconnue a eu sur moi. C’était profond. Mesdames qui portez du Lululemon au quotidien, vous êtes parfois un Prozac. Parfois un Viagra. Sérieux. À ma prochaine baisse de moral, je demande pas d’antidépresseurs : je vais réclamer une ordonnance de short moulant. C’est débile. Parfois, un simple short trop serré peut reconnecter un homme avec toute la poésie égarée de son adolescence. Et si on est chanceux, on a même droit à un frisson bonus — entre la rangée des rosés et celle des mousseux.

Voilà. C'est sûrement une anecdote insignifiante pour vous, mais elle m'a recollé des morceaux perdus en dedans. Ben oui, je sais, vous avez sûrement perdu dix minutes de votre journée. Meeeerci mille fois d’être passé me lire !


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